vendredi 27 avril 2007

La quinzaine du commerce équitable




http://capasseparmoi.org/
La semaine étudiante du commerce équitable en Mars dernier:il n'est jamais trop tôt pour s'informer et s'engager !
Additif pour les lyonnais :
Consommer et manger autrement. Un marché entièrement équitable est organisé ce week-end place Saint-Jean (5e) à l'occasion de la Quinzaine du commerce équitable. L'opération, qui s'achève le 13 mai, vise à sensibiliser les Lyonnais au principe de « consommation responsable ». Certains boulangers et restaurateurs de la ville y participeront aussi pour faire découvrir des produits issus de l'hémisphère Sud.
J. T.


" Le commerce équitable n'est plus une activité marginale réservée à quelques privilégiés soucieux de consommer dans le respect de l'homme et de la nature. C'est aujourd'hui une vraie filière, dont le chiffre d'affaires est passé, en France, de 12 à 166 millions d'euros entre 2001 et 2006 et dont l'offre ne cesse de se diversifier. Le concept : proposer de nouvelles règles du jeu au commerce mondial en garantissant un tarif de vente minimal aux petits producteurs d'Amérique latine, d'Afrique et d'Asie. Si l'alimentaire reste le coeur du marché (café, jus de fruits, chocolat , quinoa...), le textile se développe depuis deux ans (le coton notamment), et des cosmétiques commencent à apparaître. Selon un sondage Ipsos pour l'association Max Havelaar, qui labellise les produits de quelque 150 marques, chaque Français a consacré près de 2,8 euros en 2006 à des produits de commerce équitable, soit une progression de 40 % par rapport à 2005.

Près de dix mille personnes sont attendues aujourd'hui et demain au Forum national du commerce équitable, qui rassemble une centaine d'exposants à La Villette, à Paris. Cette manifestation donne le coup d'envoi à la Quinzaine du commerce équitable qui, jusqu'au 13 mai, met en avant près de trois mille initiatives dans toute la France.


Un exemple concret :


Prenez de délicates épices, des condiments du terroir éthiopien, ajoutez beaucoup de matière grise, remuez, vous obtenez le projet «Home Gardens of Ethiopia». Son inspirateur, Bernard Roussel, professeur au Muséum national d'histoire naturelle, s'enthousiasme pour «une épice mythique qui allie le goût de poivre à celui de cardamome ; la maniguette est de la famille du gingembre, il y en a plusieurs variétés de par le monde, c'est une des composantes du pastis». En Ethiopie, une variété unique, la maniguette Kororima, pousse au pied des caféiers à l'état sauvage dans la Coffee Forest, un écosystème complexe de jardins-vergers. Une fois récoltée, elle est mise à sécher sur des fils en feuilles de bananier au-dessus des foyers dans les maisons, son goût fumé en fait un produit inimitable. Si la passion de Bernard Roussel pour la «graine de paradis» se propage aux consommateurs occidentaux, ces derniers en l'achetant protégeront la plante, la Coffee Forest dans laquelle elle pousse, et le savoir des communautés locales.

Pour réconcilier l'homme, la nature et le business, les experts du projet veulent encourager la mise en place de systèmes d'indications géographiques (IG), l'équivalent des appellations d'origine contrôlée, élaborées par la France pour protéger ses spiritueux. Les pays en développement leur portent une attention croissante. En Afrique, on s'interroge, on tâtonne. L'Afrique du Sud a opté pour un système de marque, qui garantit le nom du produit, mais pas son attachement au terroir, à sa qualité, et à son mode de production. Les IG présupposent, elles, des liens entre le produit, un espace géographique et un savoir-faire humain.


Tradition.

Réunis à Addis-Abeba, à l'initiative de l'Institut pour la recherche et le développement, du Muséum national d'histoire naturelle de Paris et du projet français Biodivalloc sur la biodiversité, des experts du monde entier ont réfléchi cette semaine, en collaboration avec les autorités éthiopiennes, à l'opportunité de mettre en place un tel dispositif en Ethiopie. C'est avec dix produits de terroir triés sur le volet que l'expérience devrait commencer.
Ce pays n'a pas été choisi au hasard. Certaines communautés y ont élaboré des jardins où coexistent jusqu'à 200 espèces végétales. A ces lieux s'attachent des rituels et des traditions, menacés par la pauvreté. «La biodiversité disparaît en même temps que les savoir-faire, qui ne sont plus transmis», explique Zemede Tasfaw, professeur de botanique à l'université d'Addis-Abeba. Rentabilité oblige, les fermiers renoncent aux cultures traditionnelles pour planter du chou, ou encore du qat, une plante psychotrope consommée en grande quantité dans la corne de l'Afrique.
Une idée bien ancrée veut que la préservation de la nature aille de pair avec l'absence de présence humaine. En Afrique, elle se traduit parfois par l'érection de murs pour protéger les parcs des populations avoisinantes. L'anthropologue Alula Pankhurst souligne pourtant qu' «il existe un lien très fort entre diversité culturelle et diversité biologique», magistralement illustré en Ethiopie. Et que la mise en place des IG pourrait renforcer. Au Mexique, la formule a été développée avec succès. «La production standardisée de produits agricoles est allée de pair avec les migrations massives vers les villes», explique le biologiste mexicain Jorge Larson. «Aujourd'hui, la plupart de ces migrants ont perdu la mémoire des goûts d'antan, les IG sont un moyen de transférer une part de cette mémoire.» Il faut aussi compter avec des consommateurs en quête d'expérience unique, de raffinement et d'exotisme. Dans la logique des IG, ils acceptent de payer un premium, non pour rémunérer de pauvres fermiers du tiers-monde, mais parce qu'ils savourent la qualité du produit. «On fait du commerce, on arrête la charité», tempête Bernard Roussel.
Aux IG correspondent des cahiers des charges très précis. «On peut y inclure des manières de produire respectueuses de l'environnement», insiste Delphine Marie Vivian, juriste au Cirad. Depuis 1994, tous les pays de l'OMC sont tenus de protéger les IG. Le succès de la démarche dépend des garanties de qualité du produit. Le contrôle, qui implique des procédures lourdes et coûteuses, repose sur des organismes indépendants. C'est là que le bât blesse, les organisations paysannes sont souvent faibles en Afrique. En Ethiopie par exemple, le dictateur marxiste Mengistu a forcé la main des agriculteurs, qui considèrent avec méfiance les coopératives. Se pose aussi la question de la redistribution des bénéfices aux producteurs.


Combats.

Au-delà de la protection de la biodiversité, l'Afrique pourrait tirer d'autres bénéfices des IG. Via les cahiers des charges, «on peut ramener dans la région de production tout le processus de transformation, y compris l'étiquetage et l'emballage», explique Delphine Marie Vivian. Ainsi, les producteurs de parmesan se sont-ils battus en Europe pour avoir le contrôle du râpage du fromage, estimant que cette étape participait à la qualité du produit. Ils ont eu gain de cause devant la Cour européenne de justice. Combat gagné également pour les fabricants de jambon de Parme, qui en assurent le tranchage. Autant d'exemples pour l'Afrique, à l'heure du débat sur le chômage et l'industrialisation du continent.

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