mardi 31 juillet 2007

Lettre d'été du Figaro

Mon amour,
Tu ne peux pas savoir à quel point j'ai hâte de te retrouver en Bretagne. a quel point j'ai hâte de découvrir les paysages de ton enfance, et tous les sentiers où, été après été, tes seins ont poussé. Et dire que je vais enfin rencontrer tes parents ! Ce sera si joyeux, et nous boirons du cidre à n'en plus finir ! J'ai tellement l'impression de les connaître depuis le temps qu'ils vivent dans nos conversations. Et je sais que c'est important pour toi, que c'est une véritable étape dans notre belle histoire.
Je suis bien désolé d'avoir dû rester ici pour mon travail. Mais ne t'inquiète pas pour moi, l'ambiance est beaucoup plus détendue qu'à l'habitude. Hier soir, nous sommes sortis tous ensemble dans un pub. Tu vois, c'est quelque chose qu'on ne fait jamais pendant l'année. Enfin, je ne sais pas trop ce que font mes collègues le reste de l'année, car je passe tout mon temps avec toi. Nous sommes si bien tous les deux, ah... Parfois, c'est un peu silencieux, mais cela repose tellement de la frénésie de la journée. En tout cas, c'était agréable de varier un peu le programme.
Ce 25 juillet m'est subitement apparu comme une météorite de beauté, la lumière frôlait la blancheur. Paris sans les Parisiens, c'est vraiment une ville exceptionnelle. On devrait partir un jour ensemble en vacances à Paris ! Les passants sont très détendus, les voitures roulent facilement, les femmes marchent lentement. Je dois t'avouer que l'ensemble forme une vision assez sensuelle. On croise partout des touristes, on entend de l'allemand, de l'anglais, de l'italien, si bien que le français devient une langue exotique. D'ailleurs, pour prolonger cette impression, nous avons bu des mojitos. Cela faisait longtemps que je n'avais pas autant bu. Pour une fois que tu n'étais pas là pour me dire d'arrêter de boire, j'en ai profité ! C'était vraiment une soirée magique. Il y avait les deux jeunes stagiaires, Pamela et Lolita, quelle énergie de vie ces filles ! L'été, c'est le royaume des étudiants. On leur laisse la place, ils apprennent ce que nous voulons oublier. À un moment, Pamela est montée sur la table, elle levait les bras, et vraiment elle avait de superbes aisselles. J'ai pensé que tu devrais te raser plus souvent sous les bras. Tu vois, j'ai pensé à toi, même au coeur de la nuit, pendant l'ivresse. Tu l'aurais sûrement trouvée vulgaire cette fille, tu es parfois un peu rabajoise ma chérie. Moi, j'ai aimé sa façon de faire la folle, alors que le reste de la journée, elle joue à la fille sage. J'ai vraiment beaucoup ri, et je trouve que nous ne rions pas assez tous les deux. Cette soirée, c'était comme un voyage, un véritable nectar d'évasion. J'ai pensé qu'il était parfois bon, dans les couples, de se séparer un peu. De respirer l'un loin de l'autre. Les derniers temps ont été étouffants entre nous, et je peux te le dire maintenant : j'ai voulu rester à Paris pendant les vacances. Je n'arrivais pas à te l'avouer, mais je voulais prendre des vacances de toi. Et ta famille, non, vraiment. Je ne supporte déjà pas la mienne, alors je ne vais pas me coltiner la tienne pendant les vacances. Quant à la Bretagne, tu ne peux pas savoir comme ça m'angoisse. Je hais le cidre, autant boire du jus de pomme. Et ce côté, « on met des bottes pour marcher », ça me dégoûte. J'aime avoir les pieds libres en été. Bon voilà, c'est dit. Je ne vais pas te rejoindre finalement, et il est peut-être préférable que nous nous quittions. Passe de bonnes vacances, et embrasse tes parents.
David
David Foenkinos(lefigaro.fr)

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