vendredi 19 janvier 2007

Comprendre le " droit opposable"

L'UMP n'est pas ma tasse de thé mais j'ai trouvé cet article fort intéressant ! Il permet d'avoir des outils pour comprendre les nouvelles lois ou propositions de loi .

"Qu'est-ce qu'un droit opposable ? C'est un droit que l'on peut faire valoir devant les tribunaux. La liberté de la presse, le droit d'être soigné, le droit de scolariser ses enfants sont des droits opposables. Mais le droit d'obtenir un emploi qui est inscrit dans le préambule de la Constitution n'est pas un droit opposable parce qu'il ne peut pas l'être : nul ne peut décréter la disparition du chômage.
Le droit au logement peut-il être opposable ? Il faut s'entendre d'abord sur le sens des mots. Il ne s'agit pas du droit de réquisition, qui existe déjà. Il ne s'agit pas non plus du droit d'être logé gratuitement. Il s'agit pour chacun de trouver un logement correspondant à ses moyens dans sa commune ou dans son agglomération. Le droit au logement opposable, c'est l'obligation pour la collectivité responsable de faire construire assez de logements pour répondre à la demande. Contrairement à la loi de solidarité urbaine qui impose à chaque commune au moins 20 % de logements sociaux, le droit opposable n'est pas une obligation de moyens, mais une obligation de résultats.
Si la loi dispose que le droit au logement deviendra opposable d'ici à dix ans, cela signifie que les collectivités ont dix ans pour rattraper leur retard et qu'à l'échéance leur responsabilité pourra être mise en cause.
Pour résorber la crise du logement, il manque en France, selon les estimations, de 700.000 à 800.000 logements. Combler cet écart en dix ans n'est pas un objectif déraisonnable. Instaurer le droit opposable, c'est forcer chacun à se sentir concerné au lieu que tout le monde continue de se renvoyer la balle sans qu'il ne se passe rien. Ce n'est ni du dirigisme, ni du collectivisme, comme l'ont proclamé certains. C'est simplement la mise en oeuvre du principe de responsabilité et de la régulation sociale par le droit qui sont les caractéristiques d'une vraie société libérale. Pas d'inspecteurs, de règlements tatillons, de bureaucratie supplémentaires. Juste une responsabilité, et le juge en dernier recours, pour bien s'assurer qu'elle est effective. Cela condamne-t-il à la multiplication des contentieux ? Le droit de scolariser ses enfants suscite peu de contentieux : son opposabilité incite à trouver des solutions avant d'en arriver là et tout le monde se sent obligé de construire des écoles. Pourquoi ne pourrait-on pas espérer le même résultat pour le logement ?
Naturellement, fixer les droits et les devoirs de chacun et les conditions des recours demande de la concertation et du temps. Vouloir définir les contours du droit opposable au logement dans la loi en quelques semaines n'est pas réaliste. Se fixer d'y parvenir d'ici à la fin de 2007 serait en revanche raisonnable d'autant que l'on dispose de l'expérience anglaise d'un droit opposable très ciblé, et de l'expérience écossaise, qui vise un public plus large avec, à terme, une généralisation. Il faut aussi que l'Etat s'engage pour soutenir les maires bâtisseurs, pour mieux cibler les aides à la construction sur les communes et les agglomérations où les besoins sont criants, pour libérer lui-même des terrains. Le droit au logement ne préjuge pas en lui-même du degré de socialisation du parc de logements. Rien n'empêche de vendre une partie du stock de logements sociaux aux locataires au fur et à mesure des nouvelles constructions. Le droit au logement ne doit pas être confondu avec le droit à l'hébergement, qui ne concerne que les structures d'accueil d'urgence.
Le principe de l'opposabilité peut être étendu à d'autres droits : à la garde des enfants pour les femmes qui travaillent, au logement étudiant, à la scolarisation des enfants handicapés, à l'accueil de la dépendance, qui sont les droits du XXIe siècle. Le moment est venu de passer des droits virtuels et déclamatoires aux droits réels et effectifs, de la logique des moyens à celle des résultats. La politique française a plus besoin de morale de la responsabilité que d'idéologie. C'est bien le message des droits opposables.
HENRI GUAINO est ancien commissaire général au Plan.
site:http://blog-ump.typepad.fr/blog/2007/01/henri_guaino_dr.html#more

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