Africa Remix: l'art moderne africain finit son tour du monde en Afrique :
Africa Remix, exposition d'art contemporain africain qui a attiré des centaines de milliers de visiteurs dans les plus grands musées, s'est ouverte dimanche à Johannesburg, pour la première fois en Afrique et pour la dernière fois dans le monde.
Lancée en 2004 à Düsseldorf, en Allemagne, puis à Londres, Paris, Tokyo et Stockholm, Africa Remix expose 200 oeuvres de 85 artistes jusqu'à fin septembre à la Johannesburg Art Gallery (JAG).
"C'est une exposition africaine avec des artistes africains, c'est logique de l'avoir en Afrique", explique Simon Njami, conservateur d'Africa Remix et critique d'art d'origine camerounaise, basé à Paris.
Peintures, sculptures, photos, dessins, videos, installations interactives: cette anthologie de la création africaine montre un métissage d'art traditionnel et contemporain, de matériaux bruts et recyclés, exprimant les identités multiples d'artistes originaires de 25 pays et de la diaspora.Les oeuvres, dont la moitié sont déjà vendues, se dévoilent en trois étapes --identité et histoire, corps et âme, ville et campagne-- et témoignent parfois du lourd héritage de la colonisation et des guerres.
Dans "African adventure", les personnages de Jane Alexander, mi-humains/mi-animaux, certains en costume-cravate debout sur des caisses d'explosifs, dégagent par leur inertie même toute la violence qui a ravagé la terre rouge sud-africaine, où la sculptrice est née.
D'autres oeuvres sont un brin provocatrices: le "Great American Nude" du Soudanais Hassan Musa montre Ben Laden nu, inspiré de "La fille allongée" de Boucher, sur fond de drapeau américain; devant, une Tour Eiffel du Mozambicain Gonçalo Mabunda, faite d'armes et de munitions de la guerre civile.
Dans la video "The white lady" de Loulou Cherinet, huit Noirs rient aux récits de leurs expériences amoureuses avec des Blanches. "Mon père est éthiopien, ma mère suédoise. Ce n'est pas de la provocation: j'ai grandi avec ces histoires", a déclaré Loulou. "Le film est perçu différemment selon d'où les gens viennent. Je suis curieuse de voir les réactions ici".
Simon Njami souhaite qu'Africa Remix, fruit de vingt ans d'exploration artistique, suscite l'intérêt des Africains pour la création contemporaine, y compris des décideurs afin que les enfants d'aujourd'hui n'aient plus à "aller à Londres, New York ou Paris pour être en contact avec l'art africain"."Nous espérons qu'elle serve de catalyseur", a déclaré à la presse Clive Kellner, le directeur de la JAG, bâtie au début du XXe siècle à Hillbrow, quartier central aujourd'hui dégradé et réputé comme le plus dangereux de Johannesburg.
L'installation d'Africa Remix a coûté 3 millions de rands (environ 330.000 EUR), financés par le mécennat, ce qui permet d'ouvrir l'exposition gratuitement.
Conférences et visites commentées donnent l'occasion aux artistes, experts et conservateurs de musées de communiquer entre eux et avec le public.
"Mon travail a fait le tour du monde. Mais c'est la première fois que je viens en Afrique du Sud. C'est un symbole très fort pour moi", a déclaré le designer malien Cheick Diallo, dont l'oeuvre créée pour Africa Remix --des chaises en fil de pêche autour d'une table et d'étagères recouvertes du métal de boîtes de conserve-- invite à feuilleter les ouvrages des grands auteurs du continent."C'était important d'avoir une bibliothèque sur l'africanité, explique Simon Njami. Car les gens entrent dans les musées comme ils entrent dans un temple. Là, ils peuvent s'assoir, être vraiment dans l'exposition."
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