jeudi 3 mai 2007

Parlons d'amour



J'écris très rarement des chansons d'amour. L'amour, c'est soit du pipeau, de la propagande pour exploiter le couple et la famille, soit un sentiment profond qui se partage seulement à deux. Lorsque je pense à l'amour, c'est à l'amour de vivre, ça prend on ne sait pas comment et quelquefois pour rien. C'est très joyeux, très beau. Il y a forcément une parcelle de Dieu dans cet amour de tout et de tout le monde, quelque chose de divin, mais là, il faudra que je fasse encore beaucoup de chemin pour me sentir digne d'en parler.
Brigitte Fontaine


En dehors de l'amour ressenti pour une autre personne, j'emploierais le mot «amour» concernant la nature - celle, sauvage, du Québec me manque - mon métier, et l'art, en général. Je ne me considère pas comme un grand spécialiste des chansons d'amour. J'en parle à travers mes personnages, selon des situations précises: ce n'est donc pas forcément ma vision personnelle qui s'exprime. Charles Aznavour a souvent dit combien il était difficile de trouver un nouvel angle pour évoquer l'amour. Ziggy (Starmania, 1979) était un sujet neuf: une femme amoureuse d'un gay. Etre prêtre et aimer une femme (Notre-Dame de Paris, 1998) évoquait le célibat des prêtres. Belle traitait du désir... Je crois que ma plus belle chanson d'amour reste finalement L'amour existe encore (Céline Dion, 1991). C'était la première fois que le sida apparaissait dans un texte. A cette époque, où le virus explosait, j'aurais pu récrire un Le monde est stone, mais je suis un optimiste. J'ai préféré lancer un cri d'espoir.
Luc Plamandon


Il faudrait qu'on se décoince un peu... Qu'on dissocie le sexe des sentiments. Comme on a dissocié le sexe de la reproduction. Je suis pour des rencontres instant sex. Au lieu de se tendre la main ou un bout de joue, on se roulerait carrément une pelle. Et plus, si affinités. Je suis très jaloux des homos, par exemple. Entre eux, ils se disent la vérité sur leurs plaisirs, leurs envies. Ils sont décoincés, normaux, eux. Faire l'amour avec quelqu'un qui vous ressemble est normal. En revanche, quand on est un homme, aimer quelqu'un d'aussi différent, de bizarre qu'une femme est anormal. C'est ce qui est passionnant, d'ailleurs.
Frédéric Beigbeder


C'était le 22 janvier dernier. Nous sommes allés à la maternité le matin, elle est née l'après-midi. Deux minutes après, j'ouvrais une bouteille de champagne. J'étais content que ce soit une fille. Attendri. Un peu extérieur, aussi. Je n'étais pas baba devant elle. A la maison, il y a des enfants à tous les étages et, quand elle est arrivée, il fallait que ça s'organise bien, c'est tout. Quand on a déjà des enfants, une naissance, c'est une poursuite des choses. On aménage une chambre, on n'aménage pas sa vie. Ça a été comme ça jusqu'à son premier sourire. Il y a deux mois. Un soir, je suis entré dans sa chambre. Elle était là, toute petite, avec ses grands yeux. Elle s'est mise à battre des jambes, elle a voulu que je la prenne. C'était merveilleux.
Maintenant, elle est dans ma vie. Quand je rentre, je vais la voir. Je la prends. Je l'emmène. Elle frotte ses joues contre ma moustache. Elle me sourit. Je lui ai fait une place à côté de moi, dans mon bureau. J'aime passer du temps avec elle, la regarder battre des jambes, me sourire. On est bien, là, seuls, tous les deux. Elle s'appelle Lili. Tout à l'heure, je vais aller lui acheter une chaise...
Dan Franck


Parler d'amour? Ça tombe bien. En ce moment, je suis dans l'amour jusqu'au cou. Je nage dans l'amour. Je patauge dans l'amour. Je n'en peux plus de l'amour. J'achève à l'instant (je vais la faire relier de ce pas) une histoire sur laquelle je cogite depuis presque un an. Ça ne parle que d'amour. Un an que je ne pense qu'à ça. A mes personnages. Comment ils se sont rencontrés. Comment ils se sont abordés. Comment ils se sont embrassés, enlacés. Comment ils se sont quittés. De quoi ils se souviennent. Ce qu'ils regrettent et ce qu'ils n'avoueront jamais. Comment les photos jaunissent. Comment les blessures se referment et pourquoi certaines cicatrisent plus mal que d'autres.
C'est une toute petite histoire de rien du tout et pourtant j'ai essayé de dire plein de choses sensées sur l'amour. Y suis-je parvenue? Y parvient-on jamais? Je n'en sais rien. Je suis épuisée.
Quelle bécasse! Au lieu d'écrire, je ferais mieux d'aller batifoler. Allez, j'y vais. Qui sait? Peut-être qu'il sera mignon, le type des photocopieuses...
Anna Gavalda

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