Bataille contre l'Etat après le suicide d'un détenu
SOCIETE - Karine a fini par se fâcher. Depuis sept ans, cette femme se bat pour que l’Etat reconnaisse sa responsabilité dans la mort du père de sa fille, Orlando, qui s’est suicidé en prison, le 8 décembre 2000. En juillet, le tribunal administratif (TA) de Lyon a condamné l’administration pénitentiaire, qui a fait appel. Et dans la foulée, un agent de la caisse d’allocations familiales aurait annoncé à Karine que la Caf allait lui réclamer 25% des dommages et intérêts versés par l’Etat…
Dans son jugement, rendu le 3 juillet 2007 (lire), le TA a fixé à 8.000 euros la somme à verser à Léa, qui avait 5 ans lorsque son père s’est pendu en prison. Et autant à verser à la mère, qui avait largement alerté la prison et son directeur du risque de suicide d’Orlando, qui avait fait de nombreuses tentatives et lui avait écrit pour lui dire que cette fois, il passerait à l’acte (lire).
Appel.
Alors que la décision venait d’être rendue, Karine a reçu un agent de la Caisse d’allocation familiale, pour un contrôle avec visite à son domicile. Le rendez-vous était théoriquement sans rapport avec le jugement, mais l’employée qui s’était déplacée a demandé à Karine si elle avait des biens personnels, et si elle avait touché un héritage. Karine a répondu que non, mais qu’elle venait de gagner un procès contre l’Etat qui devait lui verser 8.000 euros. Elle ne savait alors encore si l’administration ferait appel. Son interlocutrice lui aurait indiqué alors que la Caf, qui verse à Karine une allocation de soutien familial depuis le décès d’Orlando (environ 83 euros par mois) était en droit de percevoir 25% de ces dommages et intérêts.
Quelque temps plus tard, Karine s’est rendue à la Caf, pour une histoire de papiers. On lui a demandé si elle avait touché la somme. Elle a répondu que l’Etat venait de faire appel. Depuis, la Caf lui demande un papier prouvant cet appel. Mais un tel document n’existe pas.Karine ne pourra prouver l’appel que lorsque la cour administrative aura fixé l'audience, et lancé les convocations.
Plaisanterie.
Après quelques demandes orales, la caisse a finalement envoyé un courrier, le 8 novembre, à la jeune femme : «Veuillez indiquer la nature et le montant de l’indemnité que vous percevez des prisons de Lyon». Alors Karine s’est fâchée : «Je suppose que c’est une plaisanterie !», a-t-elle écrit en grand lettres sur le formulaire de réponse.
Contactée par Libération, la Caisse d’allocation familiale assure qu’il n’y aura pas de prélèvement sur les éventuels dommages et intérêts versés en appel. «Simplement, elle a annoncé une rentrée d’argent et les prestations qu’elle touche sont fonction de ses ressources, explique une porte-parole de la caisse. Mais effectivement, il lui est difficile pour l’instant de prouver qu’il y a appel. Elle pourra le justifier plus tard. En revanche, rien ne laisse présupposer que quoi que ce soit sera prélevé sur ce type de dédommagement. La législation est complexe et peut-être que son interlocuteur ne s’est pas bien fait comprendre.»
Karine attend désormais l’appel. Elle avait été choquée en apprenant le recours de l’administration. Elle avait écrit à la Garde des Sceaux, pour s’étonner de ce que toutes les victimes n’étaient pas traitées avec les mêmes attentions. Elle n’a jamais eu de réponse.
Ol.B.
libelyon.fr
mercredi 12 décembre 2007
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