mercredi 1 août 2007

A bicyclette


Un très bel article trouvé sur la Tribune de Genève !


On se dope au gigot et on se shoote au Banania



Pierre Dac, qui avait plus d'un tour dans son sac, disait que «sans l'invention de la roue, les coureurs du Tour de France auraient été contraints de transporter leurs vélos sur le dos». Dans ces conditions extrêmes, ils auraient peut-être été contraints de se doper. Tournons sans regret cette page du feuilleton de l'été pour remonter dans le temps, où c'était plus rigolo.


Les écrivains ont toujours eu un faible pour le vélo.


De Jarry à Robe-Grillet, en passant par Jules Romains, Paul Morand, Georges Bernanos, Roger Vailland, Miller, Céline, Adamov, Beckett et Blondin. Déjà dans l'Antiquité, Cicéron évoquait le fameux «Quousque tandem» des frères Catilina au Grand Prix de Rome. Dans «Vive le vélo», Jacques Durand évoque la bicyclette de Jules Romains qui, dans «Les Copains», zigzague entre l'antimilitarisme et l'anticléricalisme en égratignant d'une pédale légère des valeurs bourgeoises. Avec Bernanos, le vélo, entre la transcendance et la crevaison, accompagne le Curé de campagne dans sa quête spirituelle et rurale.



Tournons la page.

De 1954 à 1982, Antoine Blondin a rédigé pour «L'Equipe» quelque sept cents chroniques, dont les deux tiers ont été consacrés au Tour de France. Une prose admirable. Jacques Laurent disait de Blondin que nous avons à faire à l'un des rares auteurs contemporains qui pratiquent le français comme une langue maternelle: si notre langue n'existait pas, il aurait été capable de l'inventer. A eux seuls, ses titres étaient de petits chefs-d'?uvre: «Du pin et des jeux, Ce pédaleur de Charles, La victoire à Ventoux, Cépage et sans pitié, L'affaire est dans le sacre, Livio du village, Le galop romain, Allons enfants de l'apathie, Aravis sans fin».
En 1967, le Tour fait étape à Divonne-les-Bains. En pénétrant dans le château, Blondin débarque chez la comtesse de Ségur à l'heure du goûter. On attend un hôte important, sans doute le général Dourakine. Mais il s'agit d'un ministre, qui arrive précédé par les petits flics modèles. «A ceux-ci, on donna, sous les tilleuls, de grandes tartines de pain bis, des framboises de nos bois et du lait de ferme».


Blondin cite un coureur genevois. «Même les Suisses, qui excellent pourtant à donner le change, renonçaient, après deux tentatives de Binggeli, à faire chanter le maillot rouge à croix blanche en lisière de leur frontière que nous avons longée à moins d'un jet d'arbalète».


Autre passionné de vélo, Tristan Bernard avait été invité à suivre l'épreuve. On est en 1935. L'écrivain note qu'il aurait voulu entreprendre le Tour à vélo, mais que c'était à une dose mesurée qu'il avait pratiqué toute sa vie la culture physique.



Le 4 juillet, Antonin Magne a le maillot jaune et Speicher a pris un peu de retard. Le 8 juillet, traversée de Genève avant les cyclistes. Tristan Bernard apprécie de recueillir des bravos de personnes impatientes et dont l'enthousiasme trop contenu déborde sur les voitures officielles: «La population genevoise borde la route du Tour dans un ordre admirable», note-t-il.
JEAN-CLAUDE FERRIER ( tdg.ch)

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