http://laurent-jacqua.blogs.nouvelobs.com/
Blog de prisonnier depuis sa cellule de la maison d'arrêt de Poissy
Attention ! Je ne cautionne rien ! Chaque délit mérite sa peine ! Il m'a pourtant semblé intéressant d'entendre la voix de l'autre côté du miroir..
"Un prisonnier qui refuse que l’on parle à sa place"
Propos recueillis par Charlotte Menegaux (lefigaro.fr).
Laurent Jacqua, 40 ans, est en prison depuis 1984. D'abord condamné pour homicide puis pour braquages et évasions, il ne devrait pas être libéré avant 2018. Séropositif, il mène un combat pour une application plus libérale de la loi Kouchner qui permet, en principe, la libération des détenus gravement malades.
Grâce à sa femme, qui fait le relais entre ses textes écrits à la main dans sa cellule de la maison centrale de Poissy et le site Internet, Laurent Jacqua tient un blog avec régularité et liberté de ton. Un blog qui ne fait toutefois pas l’unanimité. Après son premier billet, en janvier 2006, le prisonnier avait formulé une «réponse aux blogueurs gentils», auxquels il demandait de «ne pas s’apitoyer sur son sort», et aux «blogueurs méchants», auxquels il assénait : «Justice a été faite ! Et je n’autorise personne à me rejuger. Que cela vous plaise ou non, je m’exprimerai !»
Entretien*.
lefigaro.fr : Etes-vous, à votre connaissance, le premier prisonnier blogueur ?
Laurent Jacqua : Oui, je suis certainement le premier blogueur incarcéré. Mais j’espère que cela se développera car ce nouveau moyen d’expression permet d’atteindre un maximum de consciences endormies et de les éclairer sur le monde carcéral.
Quel est votre objectif ?
Mon objectif principal est de briser le silence scandaleux qui règne dans les prisons françaises sur le sujet tabou de la santé et des dysfonctionnements qui ont pour conséquences des traitements inhumains et dégradants, menant à la mort de centaines de détenus.
Comment avez-vous procédé pour ouvrir un blog en prison ?
Très intéressé par la vie carcérale, le site du Nouvel Observateur m’a proposé d’ouvrir un blog sur sa plateforme, en janvier 2006. Chose que j’ai acceptée afin de faire connaître mon combat pour la libération des détenus malades.
Ma femme, que j’ai rencontrée lorsqu’elle était visiteuse de prison, s’est occupée de la procédure pratique. Tout est à son nom. Elle est même rémunérée en tant que pigiste par le site du Nouvel Obs à raison de 100€ par texte environ.
Comment alimentez-vous votre blog ?
Comme vous l’imaginez, je n’ai pas accès à Internet. Par conséquent tous les textes sont écrits sur papier, discutés au parloir ou envoyés par courrier à ma femme, qui les met ensuite en ligne. Si je présente ce blog comme «écrit depuis ma cellule de la maison centrale de Poissy», c’est pour donner un gage d’authenticité quant à l’origine des textes. Pour montrer que c’est un véritable détenu qui écrit.
Que peut-on y lire ?
Il y a un tas de contenus sur l’univers carcéral dont les «Interviews Interdites» qui donnent la parole à ceux qui ne l’ont pas, des textes en relation avec l’actualité et, depuis quelques semaines, des extraits de mon livre «La Guillotine Carcérale» en 16 épisodes. En somme, ce que je propose c’est l’univers carcéral décrit par un prisonnier qui refuse que l’on parle à sa place.
Je mets également en ligne des dessins que je fais. Chacun d’entre eux illustre mes textes.
Disposez-vous d’une entière liberté de ton sur les contenus qui sont mis en ligne ?
Ce blog ne fait l’objet d’aucune censure, sinon il n’aurait aucune raison d’être. Il est totalement indépendant et libre. Même si évidemment, il est lu par les autorités, du ministère au simple surveillant.
Votre blog ne manque pas de faire réagir. Lisez-vous les commentaires des internautes ? Est-il facile d’échanger des points de vue avec eux ?
Oui, je lis les commentaires [ndlr : régulièrement imprimés par sa femme qui les lui envoie], mais compte tenu de la méconnaissance du public sur le monde carcéral, il est difficile de faire changer certains préjugés et fantasmes qui règnent dans l’inconscient collectif.
Le blog reçoit entre 300 et 400 visites par jour. Parfois plus. Il y a des commentaires positifs et négatifs mais cela n’a pas vraiment d’importance car ce blog n’est pas fait pour se plaindre mais pour informer.
Faire état de la condition dramatique des détenus malades ce n’est pas polémiquer, c’est tenter de restaurer un peu d’humanité, peut-être même de sauver des vies et surtout de ne pas accepter !
* Nous n’avons pas obtenu l'autorisation d’interviewer Laurent Jacqua en face-à-face («les reportages centrés sur des cas individuels n'étant pas autorisés par l'administration pénitentiaire», a répondu le ministère de la Justice). C'est donc par écrit que le prisonnier a bien voulu répondre à nos questions.
lundi 6 août 2007
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