vendredi 2 mai 2008

Magazine Lire


"Grâce aux éditions du Cherche Midi, nous sommes en train de découvrir l'oeuvre du génial Richard Powers. Couronnée en 2006 aux Etats-Unis par le National Book Award, La chambre aux échos est son troisième roman traduit en français. Avec, en exergue, une phrase d'A.R. Luria («Pour trouver l'âme, il faut la perdre») qui est la clé du récit. Car le héros, Mark Schluter, va en effet perdre son âme à la suite d'un accident qui le privera d'une partie de sa conscience... A son chevet, Powers écrit un roman où la médecine croise le thriller, où Jules Verne chasse sur les terres de Darwin, avec un beau neurologue dans le rôle de l'exorciste et une sSur dévouée dans celui de l'ange gardien. Après le succès du Temps où nous chantions, l'Américain surdoué réussit ici un tour de force: éclairer la condition humaine, tout en nous plongeant dans le cerveau passablement détraqué d'un personnage en quête d'identité."
http://www.lire.fr/extrait.asp/idC=52220/idR=202/idG=4

"A la tombée de la nuit, les grues se posent en flot continu. Par rubans, elles déroulent leurs trajectoires descendantes, lâches sur le fond du ciel. De tous les points de l'horizon, elles arrivent par flottaisons de douze et tombent avec le jour. Des populations de Grus canadensis s'installent sur la rivière en dégel. Elles s'amassent sur les bancs de sable où elles grappillent, battent des ailes et trompettent: première vague d'un exode massif. De minute en minute, les oiseaux se posent en nombre croissant et l'air rougeoie de leurs cris.
Un cou s'allonge; derrière, flottent les pattes. De la taille d'un homme, les ailes s'incurvent vers l'avant. Tendues comme des doigts, les rémiges basculent l'oiseau dans le plan du vent. La tête couleur sang s'incline et les ailes se touchent; un prêtre en habit consacrant le pain. La queue se cambre et le ventre s'arque, surpris par le surgissement du sol. Les pattes lancent des talonnades, leurs articulations inversées battent l'air comme un train d'atterrissage endommagé. Une autre grue plonge et trébuche, emportée vers l'avant; elle lutte pour se faire une place sur cette aire d'attente surpeuplée, le long de ces quelques kilomètres d'eau assez larges et limpides pour laisser croire qu'ils sont sûrs.
Le crépuscule arrive tôt, et il en sera ainsi pour quelques semaines encore. Sous l'empiétement des saules et des peupliers, le ciel bleu métallique flamboie d'un rose bref puis s'effondre dans l'indigo. Derniers jours de février sur la Platte, et les brumes froides de la nuit stagnent au-dessus de l'eau, gelant les éteules restées là depuis l'automne, qui emplissent les champs près des berges. Les oiseaux agités, grands comme des enfants, se pressent aile contre aile sur cet arpent de rivière qu'ils ont appris à trouver de mémoire.
A la fin de l'hiver, ils convergent ici, comme de toute éternité, et tapissent la plaine humide. Dans cette lumière, quelque chose de saurien persiste en eux: les plus vieux volatiles de la terre, à un saut de puce du ptérodactyle. Alors que l'obscurité tombe enfin, le monde rejoint ses commencements, ce crépuscule vieux de soixante millions d'années qui vit débuter cette migration...."
Lire la suite de l'extrait sur la page citée plus haut.

J'aime cette manière de décrire, précise et imagée. Encore un livre que j'aimerais lire!
Merci au magazine Lire qui nous propose des extraits allèchants :
http://www.lire.fr/extraits/default.asp/idR=202


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